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Docteur Abdou Salami Abdou, 

Gouverneur de l’Île Autonome de Ndzouani - Union des Comores

 

Le développement est un phénomène multidimentitionnel qui, dans les petits territoires insulaires est souvent analysé sous la dimension de la vulnérabilité économique, sociale et environnementale (faibles populations, ressources limitées, vulnérabilité accrue aux catastrophes naturelles et forte dépendance vis-à-vis des échanges internationaux) et autres handicaps qui affectent leurs perspectives de croissance. Face à un tel constat, Ndzuwani ne fait pas figure d’exception étant donné qu’elle est une petite île (424 Km2, environ 350 000 hts), autonome au sein de l’Union des Comores, un pays insulaire de l’Océan Indien. Les défis à relever en matière de développement sont nombreux à l’instar des îles soeurs de l’archipel et souvent ce sont des défis communs, partagés avec d’autres territoires de mêmes caractéristiques de par le monde. Même si certains territoires insulaires s’affichent depuis quelques années parmi les économies les plus prospères au monde, ils font tous l’objet d’une attention particulière portée sur les préoccupations en matière de changement climatique et pour la majorité d’entre elles, de dépendance sur le plan économique.
 

Les préoccupations en matière de changement climatique 

Les petits territoires insulaires partagent un certain nombre de défis communs à relever. La vulnérabilité environnementale est une de ces priorités et fait souvent l’objet de grands débats internationaux. Ces îles sont pour la plus part dotés d'une biodiversité unique, de ressources naturelles et océaniques qu’ils peuvent utiliser pour transformer ces défis en opportunités pour un développement qui crée des emplois et une prospérité partagée au bénéfice de leur peuple. Pour le cas de Ndzuwani, l’Île abrite une faune côtière et marine caractérisée par une grande diversité biologique et comporte des éléments d’importance mondiale comme le Coelacanthe des Comores (ou Latimeria chalumnae, un poisson remontant à plus de 65 millions d’années), des baleines, tortues et dauphins. La forêt naturelle représente un réservoir unique de nombreuses espèces endémiques et d’écosystèmes spécifiquement représentatifs à l’exemple de la chauve-souris Livingstone. 

Cependant, toutes ces richesses font face à une menace sérieuse de portée mondiale : le changement climatique. Dans un tel contexte, on peut s’interroger sur la question de développement des petites îles comme Ndzuwani, devant ce phénomène d’autant plus prévisible que certains pays insulaires encaissent souvent des grosses pertes économiques à cause de catastrophes climatiques. L’Île de Ndzuwani, à l’instar des petites îles, subit elle aussi les conséquences du réchauffement climatique. Il s’agit entre autres de la montée du niveau de la mer, fortement encouragée par l’extraction de sable fait par les habitants. Chaque élévation d'un centimètre grignote un peu plus les plages et les littoraux au détriment des infrastructures routières souvent construites près de la côte et des habitations des villes côtières. Il s’agit aussi de l’assèchement des rivières et l’érosion des sols causés par la déforestation par l’homme et le déséquilibre pluviométrique. Toutes des menaces évidentes pour l’île. L’assèchement exponentiel de nos cours d’eau, certes en partie à cause de la pression anthropique sur le corridor forestier, mais le phénomène de changement climatique en est lui aussi pour quelque chose. 

Le développement des petites îles sur fond de dépendance économique 

Les petites îles recouvrent, chacune en ce qui lui concerne, des réalités diverses, tant sur le plan géographique que démographique et économique. L’enclavement (aérien et/ou maritime), la proximité ou l’éloignement par rapport aux rivages continentaux et aux grandes lignes maritimes, sans oublier les limites de leur marché intérieur, sont autant d’aspects qui définissent le degré d’opportunités que les petites îles peuvent en avoir. Ces aspects sont souvent communs entre plusieurs territoires insulaires à l’exemple de l’île de Ndzuwani. Sa spécificité se traduit par son statut politique, une île autonome, au sein d’un ensemble comorien. L’aspect le plus commun entre les îles est l’isolement. La rupture physique nécessite une adaptation de modes de transport avec des coûts parfois plus onéreux. L’illustration parfaite est celle de la desserte aérienne de l’île de Ndzuwani où l’aéroport international le plus proche se situe sur une autre île de l’archipel. Elle est assurée par de petites compagnies de transports privés à des prix prohibitifs. Le déplacement dans l’Île pour/de l’étranger doit donc se faire en deux temps (escale à l’aéroport international du pays) avec souvent des difficultés d’accès et des surcoûts. 

En dehors des limites susmentionnées, les économies insulaires se contentent, pour la plus part d’entre elles, des marchés intérieurs réduits qui ne permettent pas de répondre aux besoins fondamentaux de leurs populations, ni de réaliser des économies d’échelle. Les causes profondes de cette situation est le caractère de dépendance économique effective de leurs économies avec l’extérieur. La capacité d’orienter l’activité économique vers l’intérieur de ces Iles sera une manière d’atténuer ce caractère de dépendance économique et promouvoir le développement d’une manière progressive. 

Les îles doivent donc, dans leur contexte de développement, adopter des mesures d’adaptations, des contournements selon la disposition de chacune. Certaines trouvent la généreuse dotation en ressources naturelles (mer, plage, soleil…) comme un préalable pour le développement socioéconomique. Avec le développement et la promotion du tourisme, des contraintes telles l’isolement et/ou l’éloignement des îles peuvent constituer des facteurs attractifs. La spécialisation touristique a apporté une réponse appropriée à certains petits territoires insulaires. Par ailleurs, les besoins et défis en matière de financement du développement pour permettre aux petits territoires insulaires de concrétiser leurs aspirations au développement durable dépendent souvent d’autres acteurs : donateurs et bailleurs de fonds, partenaires bi et multilatéraux, autres partenaires au développement. L’Île de Ndzuwani, de par son statut, est confronté à une double dépendance, celle du Gouvernement Central de l’Union des Comores (notamment sur les questions relevant de l’énergie, des infrastructures de communication, da la fourniture des hydrocarbures, de la masse salariale…) et des bailleurs de fonds internationaux qui appuient le pays. 

Les défis de développement de l’Ile de Ndzuwani 

Pour relever les défis de son propre développement en rapport avec les réalités insulaires ci-dessus citées, et faire profiter à la population les diverses potentialités économiques que présente l’Ile, l’Exécutif de Ndzuwani a pris des dispositions appropriées, en conformité avec les compétences qui lui sont dévolues par la Constitution de l’Union des Comores. Ces dispositions sont essentiellement inscrites dans le document stratégique d’orientation. Elles s’articulent autour de : la réduction des disparités régionales; l’appui à la communalisation; le développement du tourisme comme vecteur de croissance économique ; la protection de l’environnement ; la formation professionnelle et formation des métiers, la promotion de la bonne gouvernance économique et financière ; le développement du secteur des infrastructures routières et de l’énergie renouvelable. 

Pour y parvenir, l’Exécutif insulaire entame, en parallèle avec les efforts déployés au niveau interne et avec l’appui du Gouvernement Central, une politique d’ouverture et d’intégration au sein des organisations internationales et des collectivités dont elle peut s’associer, tout en se conformant avec le cadre constitutionnel du pays. C’est dans ce sens que l’Ile vient de joindre la famille de l’Organisations des Régions Unies (ORU-Fogar), a confirmé son adhésion à CGLU, à l’AIRF et a signé en avril dernier une convention cadre de coopération avec la région Rabat-Salé-Kénitra du Royaume du Maroc. 

 

 


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