Le droit à l'autodétermination des peuples autochtones

Marco Aparicio Wilhelmi

Docteur en droit public et professeur de droit constitutionnel

 

Les pratiques, analyses et propositions qui concernent le droit à l'autodétermination des peuples autochtones remontent à bien longtemps. La première identification claire des peuples autochtones en tant que sujets de droits et, plus précisément, en tant que peuples de droit à l'autodétermination, peut être faite, au moins, grâce à ce que l'on appelle le "Rapport Martínez Cobo", c'est-à-dire l'"Étude du problème de la discrimination à l'égard des populations autochtones" réalisée par le rapporteur spécial de la sous-commission des Nations Unies pour la prévention de la discrimination et la protection des minorités. Ce rapport, publié en 1986, affirme que "l'on commence à comprendre que les peuples autochtones ont une identité nationale propre, fondée sur des réalités historiques qui transcendent les phénomènes de solidarité face à la discrimination et à l'exploitation". À partir de ces paramètres, "l'autodétermination sous ses multiples formes est, par conséquent, la condition fondamentale pour que les peuples autochtones puissent exercer leurs droits fondamentaux et déterminer leur avenir, tout en préservant, en développant et en transmettant leur spécificité ethnique aux générations futures".

Ce parcours généreux implique, pour une part, une richesse d'expériences, de réflexions et d'avancées politiques et normatives. Mais, d'autre part, il comporte aussi un certain épuisement lié à sa capacité discutable à ralentir le rythme de la dépossession, de l'affaiblissement des structures collectives, de la violation des droits ou, plus concrètement, des processus d'ethnocide, voire de génocide.

Par conséquent, et pour ne parler que d'expressions juridiques (qui découlent évidemment d'intenses processus de mobilisation), après l'énorme impulsion donnée par la Convention n° 169 sur les peuples indigènes et tribaux de l'Organisation Internationale du Travail (OIT), approuvée en 1989, ou la chaîne de reconnaissances constitutionnelles en Amérique Latine tout au long des années 1990, le début des années 2000 a été marqué par un certain désenchantement. Les symptômes de cet épuisement sont multiples. On peut notamment souligner le manque d'efficacité pratique de la reconnaissance, qui se manifeste, par exemple, face aux réglementations internationales sur le libre-échange, la protection des investissements privés ou de la propriété intellectuelle à des fins commerciales, à travers un cadre réglementaire qui ignore ouvertement les droits autochtones aussi importants que le droit à la consultation préalable, libre et informée, et les droits territoriaux qui permettent l'accès et le bénéfice des ressources naturelles, ou la protection de la biodiversité et des savoirs traditionnels.

Cette asymétrie réglementaire a été élaborée parallèlement à l'hégémonie de la thèse du multiculturalisme libéral, c'est-à-dire une construction théorique réussie (telle qu'elle a été rapidement traduite dans les réglementations et les politiques publiques) capable de détourner le débat sur la justice sociale et, en même temps, de neutraliser les dimensions les plus transformatrices de la justice culturelle, en conservant en fin de compte la hiérarchie de l'autonomie individuelle (prétendue, formelle) par rapport à l'autogouvernement collectif.

À la suite de cette période de stagnation, la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, approuvée en septembre 2007, et les Constitutions de l'Équateur (2008) et de la Bolivie (2009) ont apporté un nouvel élan pour rouvrir les débats, élargir l'horizon des propositions et donner un nouveau sens à certaines demandes en termes de droits des peuples autochtones et, en particulier, des droits de l'homme.

En effet, les peuples autochtones ont un rôle important à jouer dans le développement de leurs droits et, en particulier, dans la réalisation et le développement de leur autodétermination en tant que peuples. A cet égard, et malgré les limitations imposées aux droits indigènes pendant la période dite progressive en Amérique Latine (par exemple, dans les cas précités de l'Equateur et de la Bolivie), nous avons assisté ces dernières années à une nouvelle revitalisation du protagonisme politique des demandes d'autogouvernement indigène. La preuve en est que le débat sur l'autodétermination, l'autonomie et l'autogouvernement occupe à nouveau le devant de la scène dans les mécanismes des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones et dans les débats constitutionnels en cours, tels que le débat chilien.

Toutefois, il convient de noter qu'au-delà des évolutions et des contextes juridiques ou politiques, qu'ils soient nationaux, régionaux ou internationaux, les notions et les pratiques d'autodétermination autochtone ont réussi à conserver une vitalité constante. Malgré les graves menaces qui pèsent sur leurs droits et la faible effectivité de ces droits, les peuples autochtones en général ont réussi à préserver non seulement leur droit à l'autonomie, mais surtout leur autonomie en tant que pratique quotidienne et créative, avant tout parce que l'autonomie est une expression essentielle de leur identité et de leur continuité en tant que groupes humains.

 


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